Katherine Bar
Est, espaces mouvants et identités fractales
Les deux frères se promenaient souvent au bord de la mer, surtout selon un caprice de Brian. Ils ne retrouvaient plus rien de la clarté des eaux de leur île, mais ils ne pouvaient pas abandonner l’habitude d’être toujours en contact avec la mer, avec le flux et le reflux, avec les horizons imperceptibles. (p 38)
Le flux et le reflux reliant l’ici et l’ailleurs, constituent les deux pôles de tension du monde contemporain caractérisé, entre autres, par une mobilité spatiale accrue, des pôles entre lesquels le sujet se forge cette conscience de la fluidité et de la fragmentarité du soi. La civilisation moderne, enfermée entre des frontières géographiques et culturelles, est redessinée constamment par les déplacements volontaires ou forcés des individus et par le partage, à l’échelle mondiale, des informations, des idées, des idéologies, et des savoirs. Cette réalité remet en question le fondement territorial des identités qui ne devrait plus se penser en tant qu’« appartenances » (Kristeva, 2001) puisque l’exil devient le constituant principal de ce devenir. En effet, quelles références identitaires pour une Roumaine qui vit au Québec, qui publie en France et qui enseigne en anglais, mais qui parle chez elle le roumain et, au quotidien, le français ? Il ne s’agit pas ici d’une simple problématique linguistique, mais d’un vrai casse-tête identitaire, car le devenir de l’être humain se joue au niveau des interrelations et du partage des symboles culturels…
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Katherine Bar.